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Adoption de l’évaluation par les pairs en dentisterie

Posted Sep 27th, 2021 in 2021, Actualités, leadership éclairé

Kiran Madesha, conseillère juridique, dentalcorp; Kristy Pilatzke, responsable de la gestion des risques et de la conformité, dentalcorp; Michelle Budd, DCD, consultante en sécurité des patients, dentalcorp


Maintenant plus que jamais, les praticiens et praticiennes de médecine dentaire du réseau de dentalcorp peuvent facilement communiquer avec leurs collègues grâce à un bon nombre de plateformes et forums en ligne, ainsi qu’à des groupes sur les réseaux sociaux. Bien que cette technologie moderne permette aux praticiens et praticiennes de partager de manière pratique des cas intéressants, de poser des questions et d’apprendre les uns des autres, ce type informel d’interaction comporte un certain nombre de restrictions en lien avec le contrôle de l’information, y inclus la reddition de comptes, la traçabilité et le suivi. C’est à ce niveau que l’évaluation formelle et professionnelle par les pairs, également connu sous le terme vérification clinique collaborative, peut devenir un outil extrêmement utile aux praticiens et praticiennes de médecine dentaire1.

Qu’est-ce que l’évaluation professionnelle par les pairs?

L’évaluation professionnelle par les pairs est une pratique bien établie et acceptée dans le secteur des soins de santé aigus comme un moyen de promouvoir le professionnalisme et maintenir la confiance de la patientèle. Elle est conçue comme un processus éducatif, un espace ouvert où les pairs collaborent dans le but d’évaluer les aspects d’une pratique, de partager leurs expériences et d’identifier les domaines où des changements peuvent être apportés. L’objectif principal de l’évaluation des pairs est d’améliorer la qualité et renforcer la sécurité des soins prodigués aux patient(e)s. Toutefois, elle peut également aider à assurer la conformité réglementaire et à respecter les normes des attentes en matière de soins de santé. Le processus d’évaluation par les pairs vise ultimement à établir un équilibre entre le droit des praticiens et praticiennes à exercer librement un jugement clinique et l’obligation de le faire judicieusement et de manière mesurée2.

Bien que l’évaluation par les pairs soit relativement peu connue en dentisterie, les similitudes entre la médecine et la dentisterie suggèrent que ce processus peut être facilement adapté pour être utilisé dans le cadre de l’exercice de la dentisterie. L’évaluation par les pairs est intrinsèquement essentielle dans le développement professionnel continu des praticiens et praticiennes de médecine dentaire et pourrait être utilisée pour identifier leurs objectifs de développement professionnel1.

Le contexte de la médecine dentaire

Il existe en général trois méthodes pour évaluer la qualité clinique en dentisterie : l’observation directe des soins prodigués aux patient(e)s, l’examen des renseignements figurant dans le dossier dentaire et les indicateurs de qualité3. Toutefois, l’observation directe est souvent intrusive et peu pratique, et les indicateurs de qualité ne sont pas toujours disponibles. Alternativement, l’évaluation par les pairs possèdent plusieurs avantages, notamment :

  • La présence du(de la) patient(e) n’est pas requise;
  • L’attention peut être portée sur un seul aspect des soins, et ce en examinant uniquement les dossiers des patient(e)s à qui des services dentaires spécifiques ont été prodigués;
  • Tous les aspects de la pratique clinique peuvent être examinés en utilisant un échantillon aléatoire des dossiers des patient(e)s;
  • Un volume important de données peut être recueilli en un temps relativement court.
Les praticiens et praticiennes de médecine dentaire pourraient initialement hésiter à se lancer dans un programme d’évaluation par les pairs par crainte de représailles, ou de peur d’être soumis à des mesures disciplinaires ou de nuire à une relation établie avec un pair. Actuellement, l’American Dental Association (ADA) [Association dentaire américaine] utilise principalement l’évaluation par les pairs pour concilier les différends entre un(e) dentiste et un(e) patient(e) ou un tiers payant4. Mais pourquoi attendre qu’un problème survienne?

Imaginez qu’un problème qui apparaît dans une radiographie vous échappe et finit par aggraver la situation au point d’entraîner un mauvais pronostic. Avoir une deuxième opinion fournira de meilleurs résultats à vos patient(e)s, aidera les praticiens et praticiennes de médecine dentaire à éviter les plaintes et pourra accroître le taux d’admission des cas ainsi que le taux de production.

Pour commencer

Les praticiens et praticiennes de médecine dentaire qui cherchent à adopter un processus formel d’évaluation par les pairs dans l’exercice de la dentisterie devraient tenir compte des éléments fondamentaux suivants.

1.  Créer un groupe d’homologues. Les praticiens et praticiennes de médecine dentaire devraient travailler en partenariat avec ceux et celles exerçant des disciplines similaires. Ceci ne se limite pas à leur propre clinique, voire la même ville : augmenter l’étendue du groupe pour y inclure des praticiens et praticiennes en dehors de leur clinique leur permet d’examiner des cas uniques et nouveaux. Il faudrait envisager d’inclure des membres d’origines, de genres et d’expériences diverses au sein de l’industrie dentaire dans le but d’atténuer certains préjugés comme la pensée de groupe5. Limiter le nombre de fournisseurs de soins dentaires qui adhèrent au groupe pourrait également contribuer à favoriser la création de liens, notamment l’établissement des relations de confiance entre les membres.

2.  Établir un processus pour soumettre et choisir les cas. Les évaluations par les pairs peuvent être lancées en utilisant des indicateurs figurant dans le processus de codification ou de documentation6. Elles peuvent être également suscitées par des plaintes liées à la qualité des soins dentaires prodigués et à la pertinence du traitement, et/ou des événements ayant des effets indésirables; mais elles peuvent être également choisies aléatoirement en l’absence de déclencheurs6. De plus, il est très important d’adhérer aux pratiques en matière d’anonymat et de confidentialité lorsque des cas sont partagés au sein d’un groupe d’homologues. Fournir des renseignements anonymes sur les cas en avance permettra aux membres du groupe de disposer de suffisamment de temps pour passer en revue ces cas, la littérature actuelle et les politiques (de la clinique et des organismes de réglementation), et obtenir une perspective externe, le cas échéant. L’adhésion à cette pratique permettra aux membres du groupe ayant un horaire chargé d’avoir des échanges fructueux sans être tenus de dédier des heures aux discussions de groupe.

3.  Définir clairement les rôles et les responsabilités pour les évaluations et les discussions des cas. Cet élément de l’évaluation par les pairs comprend la désignation d’un animateur ou d’une animatrice de réunion et la détermination de la périodicité, de la structure et des objectifs des réunions. Dépendamment du nombre de cas soumis, la période des discussions peut être établie sur une base trimestrielle ou plus fréquemment. Les cas doivent être évalués par l’entremise d’un questionnaire-type basé sur un cas comprenant un système d’attribution de points (p. ex. une échelle de notation de 1 à 4) pour mesurer les préoccupations relatives à la qualité des soins prodigués7. L’évaluation devrait être effectuée en fonction des documents qui figurent dans le dossier dentaire clinique et des connaissances de l’organisation ou de la clinique.

4.  Mettre en œuvre un système de mesure et de production de rapports. En utilisant des questionnaires-types basés sur des cas, il serait possible d’effectuer au fil du temps le suivi des données, les extraire et les analyser afin de révéler les tendances. N’oubliez pas que l’objectif ultime est de fournir des mesures concrètes afin d’améliorer les techniques, les compétences et les capacités. Il convient de partager ces conclusions avec les autres membres afin de rendre les soins dentaires prodigués aux patient(e)s plus sécuritaires.

Les données indiquent que la qualité de la tenue des dossiers cliniques constitue un solide indicateur de la qualité des soins prodigués3. Les évaluations par les pairs régulières constituent une étape importante pour s’assurer que les praticiens et praticiennes de médecine dentaire prodiguent des soins de qualité aux patient(e)s, et ce en fournissant les renseignements nécessaires pour la détermination des tendances liées à la qualité des soins, en cernant les domaines nécessitant une amélioration, en répondant aux besoins en matière de perfectionnement professionnel et en favorisant une culture axée sur la conscience de soi et la responsabilisation. Il incombe aux praticiens et praticiennes de médecine dentaire de s’assurer que les mesures nécessaires sont prises afin de satisfaire aux normes de diligence et de répondre aux exigences réglementaires liées aux soins dentaires, qui pourraient inclure un processus uniforme d’auto-vérification et d’évaluation par les pairs.


References:

1Bullock, Alison & Butterfield, S & Belfield, Clive & Morris, Z & Ribbins, P & Frame, J. (2000). A role for clinical audit and peer review in the identification of Continuing Professional Development needs for General Dental Practitioners: a discussion. British dental journal. 189. 445-8. 10.1038/sj.bdj.4800795. 

2Peer review & due process. American Medical Association. https://www.ama-assn.org/delivering-care/ethics/peer-review-due-process

3Methods of measuring clinical quality. Safety Net Dental Clinic Manual. Unit 5. Quality Assurance and Quality Improvement. https://www.dentalclinicmanual.com/5-quality/sec3-06.php

4How the dental peer review system works and what you expect from it. American Dental Association. http://www.ada.org/~/media/ADA/Member%20Center/Files/peer_review_overview.pdf

5Swaroop R. Disrupting physician clinical practice peer review. Perm J 2019;23:18-207. DOI: https://doi.org/10.7812/TPP/18-207
 
6Paterick, Zachary & Paterick, Timothy. (2019). Peer Review – Legal and Ethical Issues Faced by Medical Staff: The Mandate for Physician Leadership. Hospital Practices and Research. 4. 76-79. 10.15171/hpr.2019.15. 

7Deyo-Svendsen ME, Phillips MR, Albright JK, Schilling KA, Palmer KB. A Systematic Approach to Clinical Peer Review in a Critical Access Hospital. Qual Manag Health Care. 2016 Oct/Dec;25(4):213-218. doi: 10.1097/QMH.0000000000000113. 


À propos des auteurs

Kiran Madesha est une avocate agréée par le Barreau de l’Ontario et travaille comme conseillère juridique au sein de l’équipe de la conformité de dentalcorp. Kiran est titulaire d’un baccalauréat en droit de l’Université de Liverpool et d’une maîtrise en droit avec une spécialisation en droit de la santé de l’Université de Toronto.

Kristy Pilatzke est une professionnelle expérimentée en matière de gestion de la qualité et de la conformité, avec plus de 13 ans d’expérience dans les secteurs réglementés des soins de santé, de la fabrication de produits pharmaceutiques et de la pharmacie spécialisée aux soins aigus. Elle occupe actuellement le poste de responsable de la gestion des risques et de la conformité chez dentalcorp. Kristy est titulaire d’une maîtrise ès sciences en qualité des soins de santé obtenue à l’Université Queen’s.

La Dre Michelle Budd travaille auprès de l’équipe de la conformité et de la gestion du risque de dentalcorp en tant que consultante en sécurité des patients. Elle est titulaire d’un doctorat en chirurgie dentaire de l’Université Western. Tout en dirigeant une clinique dentaire achalandée, elle a également obtenu une maîtrise en santé publique. Michelle a travaillé en tant que consultante dentaire auprès de plusieurs compagnies d’assurance et d’agences gouvernementales et a parcouru le Canada afin d’aider les cliniques dentaires à respecter et maintenir la conformité aux normes professionnelles.

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